UNIVET NATURE s’engage dans l’initiative ONE HEALTH

L’initiative One Health (« une seule santé ») est un concept créé au début des années 2000 qui promeut une approche intégrée et unifiée de la santé publique, animale et environnementale aux échelles locales, nationales et planétaire.

Cette approche accorde un rôle majeur aux vétérinaires et propriétaires ou gestionnaires d’animaux, ainsi qu’aux personnes en contact régulier avec les faunes domestique et sauvage et l’environnement.

Par les Docteurs vétérinaires Alain Moussu & Guerric Radiere :

Trois santés ou une seule santé ?

L’initiative One Health est motivée par la nécessité de réduire et contrôler les risques de santé publique mondiale, notamment les zoonoses, et se veut conçue comme une démarche holistique. Elle repose sur le constat que 60% environ des maladies humaines infectieuses connues ont une origine animale et qu’au moins 70 % des maladies émergentes ou réémergentes graves sont depuis un siècle presque toujours des maladies zoonotiques ou à vecteurs, qui peuvent être favorisées par des déséquilibres écologiques et/ou climatiques.

Pourtant, dans sa définition même, One Health crée un déséquilibre de priorité, la santé de l’environnement et la santé animale étant mises au service de la santé humaine. Ce déséquilibre, lié à un regard anthropocentré, peut-il compromettre le succès de la démarche dont la dimension holistique risque de fait d’être incomplète ? D’autre part, la santé humaine peut-elle être analysée sous le seul prisme du risque pandémique infectieux ? Dans une récente tribune éditée par Le Monde (10 novembre 2020), un collectif de médecins, chercheurs et vétérinaires recommandait d’« intégrer santés humaine, animale, végétale et environnementale à toutes les échelles et dans toutes les dimensions ». Nous pouvons donc choisir d’explorer le concept One Health sur des objectifs plus larges que l’analyse multidisciplinaire des risques pandémiques, avec l’ambition d’obtenir plus de résultats au bénéfice des 3 santés.

Vivre en bonne santé dans un environnement sain

La santé mentale est considérée par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) comme essentielle à la santé en général. Elle est définie comme «un état de bien-être dans lequel une personne peut se réaliser, surmonter des tensions normales de la vie, accomplir un travail productif et contribuer à la vie de sa communauté». La santé mentale est largement influencée par le contexte et notamment l’environnement. De quelle façon notre santé mentale serait-elle affectée si nous étions privés de la beauté des paysages naturels et leur biodiversité ? Si nous ne sommes pas certains de la réponse, gardons-nous de répondre à la place de nos descendants !

La santé de demain ne doit pas être oubliée. Quelles ressources thérapeutiques, quels médicaments sont encore cachés dans les plantes et animaux en voie d’extinction ? Allons-nous priver nos descendants des médicaments de demain, utiles au contrôle des futures pandémies associées au déséquilibre des 3 santés comme à celui des maladies chroniques qui ne cessent de gagner en prévalence ? La santé de demain sera en grande partie issue du biomimétisme : la nature a eu des millions d’années pour évoluer, s’adapter et survivre. Elle constitue aujourd’hui un incroyable réservoir à idées pour les chercheurs en quête de procédés novateurs, notamment dans le domaine médical. Le moustique a inventé la piqûre sans douleur, l’ours a mis au point une thérapie contre la perte musculaire, le requin a développé un revêtement antibactérien capable de lutter contre les infections nosocomiales.

Les services rendus par la nature sont très impactants sur la santé. Les fonctions purifiantes des zones humides, l’intensité de la décarbonation de l’atmosphère mise en œuvre par les vieilles forêts, le rôle protecteur des mangroves à l’égard des tempêtes, les ressources alimentaires procurées par les récifs coralliens sont autant de services qui conditionnent notre capacité à respirer, boire, manger et vivre à l’abri des intempéries.

Les travers d’un regard autocentré

L’initiative One Health doit se garder de mettre les santés environnementale, végétale et animale au service de la santé humaine ou de celle des seuls animaux domestiques, sous peine de perdre en efficacité, voire d’aggraver les risques.

Il existe un courant de pensée encore très actif au sein de la profession vétérinaire qui promeut la destruction pure et simple de tout réservoir sauvage de pathogène, avec l’illusion de contrôler ainsi le risque. Pourtant en 2014, les conclusions du colloque scientifique national « Santé et biodiversité » soulignent l’effet de dilution des pathogènes par la biodiversité, ainsi que les actions humaines qui favorisent la faune sauvage comme vecteur de maladies. Le concept One Health nous indique la marche à suivre : ne pas rattacher directement les risques sanitaires à l’agent pathogène, explorer ces risques dans une vision globale et intégrée.

En se focalisant sur les risques de pandémie humaine et sur les épizooties affectant les animaux domestiques, l’initiative One Health risque-t-elle d’oublier que les mêmes causes produisent probablement les mêmes effets chez les autres espèces, à savoir les plantes et les animaux sauvages ? Risque-t-on de sous-estimer l’impact que l’agriculture et notre alimentation ont sur l’environnement ?

Une vraie approche intégrée et holistique devrait donc considérer les 3 santés comme d’égale importance quant aux enjeux et aux approches opérationnelles.

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La santé d’un écosysteme tel que la mangrove favorise la protection des rivages Madagascar (Benjamin-Kabouche)

Des crises écologiques successives qui dégradent davantage la santé

Les 3 santés sont en crise en même temps, avec le réchauffement climatique, l’effondrement de la biodiversité animale et végétale mais aussi le développement des zoonoses comme le montre la pandémie COVID-19. N’oublions pas également les changements alimentaires et agricoles qui impactent à la fois notre environnement et notre santé. Toutes les interactions entre les causes et les conséquences de ces trois crises ne sont peut-être pas connues, mais les éléments de preuve disponibles sont nombreux à converger vers un lien direct avec les activités humaines.

En libérant brutalement dans l’atmosphère le carbone stocké sous terre au cours de la longue histoire de sa planète, l’espèce humaine perturbe le fonctionnement du monde vivant, et notamment de l’ensemble des micro-organismes et leurs vecteurs. Ces perturbations sont aggravées par quantités de destructions directes des milieux naturels et leurs habitants, qui portent aujourd’hui un million d’espèces au bord de l’extinction pure et simple. Les déséquilibres induits peuvent favoriser l’expansion de maladies comme la malaria, et également de nouveaux contacts entre des pathogènes et l’homme, induisant des pandémies comme Ebola, et vraisemblablement la COVID-19.

Guerric Radiere, vétérinaire

Les vétérinaires engagés dans le développement de One Health

  • au sein des organisations et institutions nationales et internationales travaillant sur la santé et sur la biodiversité : OMS, OIE, FAO, PNUE, CIRAD, ANSES, IRD, INRAE, IPBES…
  • dans les Ecoles Vétérinaires avec des initiatives telles que le Diplôme Inter-Ecoles Santé de la faune sauvage non captive ou par exemple celles portées par les groupes Yaboumba Junior
  • dans des associations de protection de la nature
  • les instances professionnelles portent le concept dans leur communication : Conseil de l’Ordre, SNGT, SNGTV.

De nombreux praticiens accueillent et soignent bénévolement la faune sauvage en détresse, principalement dans le cadre de son transfert vers un centre de sauvegarde. Leur action comporte un important volet de sensibilisation de leurs clients sur les questions de biodiversité.

D’autres initiatives des cliniques veulent réduire l’impact écologique des activités vétérinaires (responsabilité sociale et environnementale des établissements de soins). Les cliniques achètent de plus en plus responsables, des gammes de produits respectueux de l’environnement se développent dans le secteur vétérinaire et beaucoup de cliniques sont passées au digital pour réduire la consommation de papier.

Les partenaires de la profession (laboratoires, centrales d’achat) commencent lentement à s’engager sur la voie de l’écoresponsabilité des produits proposés aux cliniques vétérinaires : ressources alimentaires durables (pêche durable, protéines d’insectes…), alimentation et produits d’hygiène BIO, circuits courts, réduction des déchets non recyclables…

Une seule santé : l’approche d’Univet Nature

Créé en 2018 par les vétérinaires de la SAS Univet et des acteurs écologues de la LPO PACA (Ligue pour la Protection des Oiseaux Provence Alpes Côte d’Azur), Univet Nature (https://univetnature.org/) est un fonds de dotation dont la vocation est triple :

  • permettre l’engagement opérationnel One Health des 6000 cliniques vétérinaires de France en faveur de la biodiversité, prenant en compte les obstacles habituels de cet engagement (les cliniques sont peu disponibles, l’énergie des équipes soignantes est totalement mobilisée vers les patients),
  • créer un mouvement de solidarité déculpabilisé et efficace entre les animaux de compagnie (qui font partie de la famille) et les animaux sauvages (martyrisés par les hommes), mouvement porté par les vétérinaires et les propriétaires d’animaux,
  • soutenir financièrement les associations de protection de la nature, notamment celles engagées dans les régions tropicales qui cumulent biodiversité maximale et menaces de destruction maximales.

Deux outils simples et performants sont proposés aux cliniques vétérinaires qui souhaitent participer avec leurs clients au mouvement One Health :

  • le microdon biodiversité à la clinique : un don de 50 centimes pour les animaux sauvages est proposé par le Terminal de Paiement Electronique à chaque transaction utilisant la carte bancaire. Entre 50 et 60% des clients acceptent la proposition en félicitant les équipes soignantes pour cette initiative.

Fonctionnelle depuis 2 ans dans 60 cliniques en France, la Goodtransaction (https://www.goodtransaction.net/) a fait la preuve de son caractère non chronophage et non intrusif pour le client. Le microdon n’introduit aucune complication comptable pour la clinique et quasiment aucun frais (en moyenne 50 euros par an).

Le microdon est très efficace puisqu’une clinique collecte en moyenne 1500 € par an. Une journée de collecte finance entre 3 et 6 jours de salaire à Madagascar, par exemple pour la surveillance des Lémuriens menacés par le braconnage et la déforestation illégale.

L’installation du microdon dans la clinique est coordonnée par Univet Nature qui remplit le dossier d’inscription et le fait signer par les associés de la clinique (écrire à contact@univetnature.org). La pédagogie relative à l’utilisation du microdon s’appuie sur une courte réunion de 15 minutes en visio avec l’équipe soignante. Des supports de communication pour la salle d’attente et sous format digital sont délivrés aux cliniques.

  • Le commerce en ligne éthique : JungleVet et Myvetshop sont deux sites vétérinaires de vente en ligne collectant des fonds pour Univet Nature. Outil digital destiné à faire revenir les clients internautes à la clinique pour leurs achats, JungleVet (https://junglevet.fr/fr/) est en contact direct avec le grand public et particulièrement efficace pour porter l’image d’une profession vétérinaire engagée pour la biodiversité.

La mobilisation de ces deux sites vétérinaires est soutenue et complétée par le groupement SAS Univetzen qui a intégré dans ses statuts le partenariat avec Univet Nature ( https://www.univetzen.fr/services/biodiversite/ ).

Une seule santé : vers une doctrine vétérinaire unifiée ?

Notre constat fait donc état :

  • d’une profession engagée sur le front One Health
  • d’une interprétation hétérogène du concept One Health et de sa mise en œuvre
  • d’un déficit d’engagement des vétérinaires praticiens, pourtant sensibles au sujet, qui semble facile à combler et qui est porteur de très belles promesses.

Sans apporter de solution définitive, Univet Nature plaide pour une union de la profession en regard du concept One Health, grâce à l’adoption partagée de principes éthiques fondateurs et à la nécessaire synergie entre les praticiens et les acteurs institutionnels.

Pour en savoir + :

1. OIE https://www.oie.int/fr/pour-les-medias/une-seule-sante/

2. OMS https://www.who.int/features/qa/one-health/fr/